CASS, ass. plén., 4 février 2011, N°09-14.619
Dans un précédent arrêt du 19 novembre 1996 (Bull. 1996, IV, n° 277) la chambre commerciale avait précisé les conditions de validité d’un pouvoir spécial en ces termes : “Mais attendu qu’il résulte de la combinaison des articles 416 et 853 du nouveau code de procédure civile et 175 du décret du 27 décembre 1985 que le pouvoir donné au mandataire ad litem doit accompagner la déclaration de créance ou être produit dans le délai de celle-ci”.
Cette solution a été reprise dans deux arrêts rendus par la même chambre le 17 décembre 1996 (Bull. 1996, IV, n° 313 ), s’agissant des déclarations de créances faites par le chef de file d’un “pool” bancaire pour le compte des autres sociétés membres du pool. Et c’est dans cette dernière affaire que l’assemblée plénière de la Cour de cassation a, par un arrêt du 26 janvier 2001 (Bull. 2001, Ass. plén., n° 1), jugé que “la recherche d’éléments de preuve d’un mandat tirés des circonstances de la cause ne pouvait suppléer l’absence de production d’un pouvoir spécial et écrit lors de la déclaration des créances ou dans le délai légal de cette déclaration”.
Dans la présente affaire soumise à la Cour de cassation, la société UNIMAT, agissant en son nom et au nom d’autres sociétés de crédit, a consenti un crédit-bail à la société Bois, Panneaux, Parquet Martine Industries (BPPMI). La société Martine Bois et Dérivés (MBD) s’est portée caution solidaire des engagements souscrits par la société BPPMI. Une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l’égard de la société BPPMI, par jugement du 17 janvier 2000, convertie en liquidation judiciaire par jugement du 28 février 2000 et étendue à la société MBD sur le fondement de la confusion des patrimoines. Entre le 16 mars et le 11 avril 2000, la société UNIMAT a déclaré au passif de la liquidation judiciaire sa propre créance et celles des autres sociétés du pool bancaire.
Lors de la vérification des créances, le gérant des sociétés débitrices a d’abord contesté le montant des sommes déclarées. Puis, tant devant le juge commissaire que devant la cour d’appel, les sociétés BPPMI et MBD ont contesté la régularité de la déclaration de créance, faute pour la société UNIMAT d’avoir produit, lors des déclarations ou dans le délai de celles-ci, un pouvoir spécial délivré par les autres sociétés composant le pool bancaire. Par ordonnance du 31 mai 2001, le juge-commissaire a admis la créance.
Par cet arrêt d’assemblée plénière du 4 février 2011, la Cour de cassation a réaffirmé, dans sa formation la plus solennelle, que la déclaration de créance équivaut à une demande en justice et ne peut valablement être faite par un tiers, s’il n’est pas avocat, en l’absence de pouvoir spécial écrit donné par le créancier dans le délai légal de déclaration, mais a considéré que cette règle, propre au mandat de représentation en justice, n’impliquait pas que la justification de ce pouvoir soit enfermée dans le délai précité et qu’elle pouvait dès lors intervenir, en cas de contestation, jusqu’au jour où le juge statue.
Sans remettre en cause le principe selon lequel le mandataire doit disposer d’un pouvoir spécial au moment de la déclaration ou dans le délai légal de celle-ci, l’arrêt admet donc, sur le terrain probatoire, que la justification de l’existence d’un pouvoir régulier puisse être rapportée jusqu’à ce que le juge statue.